Sommaire
1 – Constitution et système institutionnel
La première Constitution date de 1830. La Constitution actuellement en vigueur a été adoptée le 27 novembre 1966, inspirée de celle des États-Unis. Elle a été modifiée à plusieurs reprises (1989, 1994, 1997, puis 2004). Le texte constitutionnel établit un système unitaire, consacrant la forme démocratique et républicaine de gouvernement fondée sur la séparation classique des pouvoirs. Il prévoit un système de contrôles mutuels entre les différents pouvoirs de l’État, tout en mettant au point un système équilibré de contre-pouvoirs qui a permis une stabilité démocratique prolongée, malgré quelques périodes d’interruption.
Le Président est élu directement pour 5 ans au scrutin majoritaire à deux tours. Il n’est pas autorisé à se présenter consécutivement pour un deuxième mandat. Il nomme les membres du gouvernement. M. Tabaré Vázquez a été investi président de la République le 1er mars 2015 après avoir été élu le 30 novembre 2014 (53,6% des voix), pour la deuxième fois, à la tête de l’Etat. C’est lui qui, en 2005, avait mis fin à la longue domination de la vie politique uruguayenne par les partis « traditionnels » classés à droite (Parti colorado et Parti national) en devenant le premier président de gauche du pays.Le pouvoir législatif
est réparti entre deux Chambres : la Chambre des députés (Cámara de Representantes) et le Sénat (Asamblea General). Le Congrès bicaméral est élu pour 5 ans lors d’un scrutin proportionnel à un seul tour. La Chambre des députés compte 99 membres et le Sénat 30 (plus le vice-président de la République).
Le pouvoir judiciaire repose entre les mains de la Cour Suprême de Justice (Suprema Corte de Justicia), dont les cinq membres sont nommés par l’Assemblée générale. Cette cour promulgue les lois et éventuellement est autorité constituante. Elle est également la plus haute instance judiciaire du pays et possède une compétence unique et exclusive en matière de contrôle de la constitutionnalité. La Cour Suprême de Justice coiffe l’ensemble du système judiciaire. Il n’y a pas de ministre de la justice.
2 – Système juridique
Le droit est fondé sur un régime de Constitution rigide et de droit écrit.
Le système de précédent obligatoire ne s’applique dans aucune des instances juridictionnelles. Chaque cas est jugé de manière indépendante et les tribunaux ne sont pas liés par leurs jugements précédents.
Le système juridique présente un haut degré de spécialisation, notamment dans les domaines suivants : Civil, Commercial, Famille, Pénal, Mineurs, Douane, Contentieux administratif, ainsi que diverses sous-disciplines que la doctrine a développé à l’intérieur de chacune de ces branches.
Le droit romain et le droit canonique sont à l’origine du droit civil. Les autres sources directes du Code civil en vigueur en Uruguay depuis 1868 sont constituées par les lois espagnoles et par le code Napoléon. Promulgué par une loi du 23 janvier 1868, le code civil s’est appliqué à partir du 1er janvier 1869. Il a été l’objet de refontes partielles en 1893, puis en 1914.
Deux systèmes coexistent en matière procédurale. D’une part, les procédures civiles, commerciales, du travail et de la famille et, d’autre part, la procédure pénale.
Depuis 1988, accompagnant un grand mouvement de réforme, un nouvel ensemble de normes a été approuvé concernant la procédure civile qui a abouti notamment à l’adoption du Code Général de Procédure.
En ce qui concerne la procédure pénale, le Code de Procédure Pénale de 1980 prévoit une procédure de type inquisitorial. En effet, l’instruction préliminaire est confiée au juge, qui est doté de larges pouvoirs d’enquête (le même juge s’occupe du jugement et de l’instruction). Il s’agit d’une procédure écrite. Une nouvelle réglementation de la procédure pénale a cependant été approuvée. Elle consacre un système accusatoire atténué, dans lequel l’enquête judiciaire, l’accusation, ainsi que les mesures restrictives de liberté doivent être précédées d’une demande du Ministère Public. Le système d’audiences permet de respecter le principe classique de l’oralité.
3 – Organisation judiciaire
D’après la Constitution, la fonction juridictionnelle est exercée fondamentalement par deux grands ordres de juridictions, judiciaire et administratif, chacun ayant ses organes hiérarchiques suprêmes : la Cour Suprême de Justice et le Tribunal du Contentieux Administratif.
a) l’ordre judiciaire
La Cour Suprême, composée de cinq membres, élus par le Pouvoir Législatif, possède une large compétence juridictionnelle (recours en cassation, en révision, inconstitutionnalité, règlement de certains conflits de compétence) ainsi que des fonctions de direction, de consultation, d’administration et de désignation des autres membres du Pouvoir Judiciaire.
En deuxième instance, les Cours d’Appel (Tribunales de Apelaciones) sont composées chacune de trois membres. Elles connaissent, en appel, des contestations formées contre les jugements rendus par les tribunaux « letrados ». Elles sont situées dans la capitale – Montevideo – et sont spécialisées : civil, droit de la famille, du travail, pénal. Il existe seize cours d’appel. Sept d’entre elles ont compétence en matière civile, deux en matière de droit de la famille, trois sur les questions de droit du travail et quatre en matière pénale.
En première instance, les tribunaux (letrados) sont spécialisés dans les matières suivantes : civil, famille, travail, douane, pénal et mineurs.
Enfin, les Tribunaux de paix départementaux de la Capitale et les Tribunaux de Paix départementaux de l’intérieur interviennent dans les affaires d’importance mineure. Les « Tribunales de Faltas » (correspondant aux tribunaux de police dans le système français) interviennent, par exemple, dans la capitale en matière de contraventions.
L’organisation judiciaire est régie par les principes d’indépendance, d’autorité et d’impartialité.
b) ordre administratif
Au sommet de la hiérarchie de l’ordre administratif, on trouve le Tribunal du contentieux administratif, équivalent administratif de la Cour Suprême de Justice, composé de cinq membres élus par le Pouvoir Législatif.
Il intervient en premier et dernier ressort et relativement aux demandes de nullité des actes administratifs définitifs, pris par l’administration dans l’exercice de ses fonctions. Il est compétent pour le contrôle sur la légalité et non pas sur l’opportunité de l’affaire. Il s’agit d’une procédure non atteinte par la réforme de la procédure civile de l’année 1989 ; elle est écrite et déconcentrée.
La réparation patrimoniale de ces actes est réservée à une autre voie : la compétence est attribuée aux Tribunaux « letrados » du contentieux administratif à Montevideo, et aux Tribunaux « letrados » de l’intérieur, qui font tous partie du Pouvoir Judiciaire.
c) le ministère public
Les origines du ministère public remontent à la législation française et espagnole, mais le ministère public est organisée différemment aujourd’hui : le ministère public (Ministerio publico y fiscal) fait partie de la structure organique du Pouvoir Exécutif. Il s’agit d’un corps technique administratif subordonné à celui-ci, par l’intermédiaire du Ministère de l’Éducation et de la Culture. Du point de vue de sa structure organique, ses membres sont désignés par le Pouvoir Exécutif, après autorisation du Sénat.
Ils sont organisés hiérarchiquement comme suit :
L’organe suprême : Procureur à la Cour et Procureur Général de la nation, est doté d’une vaste gamme de compétences : juridictionnelles, administratives et de conseil.
Suivent, hiérarchiquement, les Procureurs « Letrados » Nationaux, siégeant à la capitale, où il existe une spécialisation par matières – Civil, Pénal, Douane, Mineurs, Finances. Ils agissent devant les Tribunaux de la capitale, dans leurs matières respectives. Le Procureur adjoint à la Cour et le Procureur « Letrado » suppléant sont affectés au Procureur de la Cour.
Les Procureurs « Letrados » départementaux exercent la représentation du Ministère Public dans chaque département, devant les Tribunaux « letrados » et de Paix. Ils sont compétents dans toutes les matières.
Le Procureur « Letrado » adjoint agit dans chaque Ministère Public National, lesquels hormis leur coopération avec le Procureur, assument la représentation de Ministère Public lorsque le titulaire en dispose.
4 – La magistrature
Les magistrats du Siège et du Parquet ont des carrières indépendantes mais bénéficient tous du même statut juridique quant aux principes qui régissent leur carrière.
La Cour Suprême de Justice désigne les magistrats du Siège des niveaux inférieurs. En 1988, a été créé le CEJU (Centre d’Études Judiciaires d’Uruguay, « Centro de Estudios Judicales del Uruguay ») dont l’objectif est la formation des magistrats du Siège et du Parquet.
– Centre d’Études Judiciaires d’Uruguay :
Le CEJU est une dépendance du pouvoir judiciaire qui est chargé de former les aspirants à une carrière judiciaire afin de combler les lacunes dans la formation universitaire pour l’exercice des compétences et techniques nécessaires à l’effet de l’exercice de la fonction judiciaire. Il est également responsable de la formation professionnelle des juges en activité dans les zones nécessitant une actualisation des connaissances.
Selon les dispositions de l’accord de la Cour suprême de Justice en date du 9 Septembre 1996, les rôles concrètement assignés au CEJU sont:
– Mettre en œuvre l’organisation et le fonctionnement des cours post-universitaires pour les candidats souhaitant rejoindre la magistrature ainsi que des charges techniques au sein du pouvoir judiciaire et du ministère public,
– Élaborer les programmes de ces cours,
– Sélectionner les enseignants qui seront chargés de dispenser les cours,
– Mettre en place le mécanisme d’évaluation.
Depuis 1988, les magistrats provenant du CEJU sont choisis en priorité. Il n’y a pas de magistrats non-professionnels et le système de jurés n’existe pas. Pour accéder à la magistrature, un titre universitaire d’avocat est requis.
Il existe un système de carrière au niveau du Siège et du Parquet, dans lequel on embauche pour des postes les moins élevés dans la hiérarchie et où l’on évoluerait conformément aux mérites, à la capacité et à l’ancienneté.
En 2015, pour renforcer les effectifs de la magistrature, le CEJU a effectué un appel pour la période 2015-2017 aux avocats intéressés par le cursus de formation initiale pour l’entrée dans la magistrature à passer le concours destiné à cet effet.
Le processus de sélection des candidats se termine par la mise en place d’une liste qui « comptera un maximum de trente candidats », composée de ceux qui ont obtenu la note globale la plus élevée. Les cours ont débuté mi-2015 et dureront pendant 4 semestres.
– Conseil de la Magistrature :
Il existe également un Conseil de la Magistrature («Consejo de la magistratura»). C’est un organe permanent du Pouvoir Judiciaire de la Nation, incorporé dans la Constitution par un amendement en 1994, et régit par la loi.
– Rôle : Ses pouvoirs ont été établis par l’art. 114 de la Constitution, comme suit:
« Le Conseil de la Magistrature, réglementé par une loi spéciale adoptée par la majorité absolue de tous les membres de chaque Chambre, sera responsable de la sélection des juges et de l’administration du pouvoir judiciaire. » (…) « Le Conseil sera périodiquement (re)constitué afin que l’équilibre entre la représentation des organes politiques résultant de l’élection populaire, des juges de toutes les instances et des avocats soit sauvegardé. Il sera également constitué d’autres représentants, du monde académique et scientifique, en nombre et de la manière prescrits par la loi. »
Parmi ses attributions principales, l’on peut citer la gestion des ressources et la mise en œuvre du budget attribué par la loi à l’administration de la justice ; l’exercice d’un pouvoir disciplinaire sur les magistrats ; le droit d’entamer d’éventuelles procédures de révocation des juges, voire de les suspendre; d’émettre des règles sur l’organisation judiciaire et toutes celles nécessaires pour assurer l’indépendance des juges et l’administration efficace des services de la justice.
En plus de ce qui précède, le Conseil dispose de pouvoirs spécifiques, et notamment:
• Organiser le fonctionnement de l’École de la magistrature, édicter son règlement, approuver ses programmes et cours; planifier des formations pour les juges, les fonctionnaires et employés du pouvoir judiciaire pour assurer une prestation efficace du service de la justice.
• Préparer le projet de budget annuel de la justice, conformément aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances, et l’exécuter.
– Composition : Le Conseil compte treize membres, et se décompose comme suit: trois juges de la magistrature de la Nation, six législateurs, deux représentants des avocats, un représentant de la branche exécutive, un représentant des domaines académiques et scientifiques. Le mandat des membres du Conseil de la magistrature est de quatre ans. Ils peuvent être réélus avec un intervalle de temps.