Birmanie

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1 – Constitution et système institutionnel

L’actuelle Constitution de la Birmanie, entrée théoriquement en vigueur fin mai 2008 suite à un référendum national, établit une République à régime présidentiel. C’est seulement trois ans plus tard qu’est proclamée officiellement la République de l’Union de Birmanie, instituant un gouvernement « civil » mettant fin à la junte qui gouvernait jusqu’ici, sans pour autant retirer la totalité du pouvoir aux militaires.
• Le pouvoir exécutif :
Le Président de la République est élu au scrutin indirect par un collège électoral constitué de trois comités. L’un est composé de parlementaires de la Chambre haute, le second par des parlementaires de la Chambre basse, le dernier par des parlementaires militaires désignés par le Commandant-en-chef des forces armées. Chaque comité désigne un candidat à la présidence. L’ensemble du Parlement vote par bulletin secret : le candidat ayant eu le plus de scrutin est élu Président, les deux autres deviennent vice-présidents. Leur mandat est de cinq ans.
Le Président est à la fois Chef de l’Etat et du gouvernement. Il nomme, après accord du Parlement, le procureur général et certains ministres.
La Constitution établit une décentralisation du pouvoir exécutif. Elle institue un gouvernement pour chaque état et chaque région, composé chacun de 9 ministres nommés et présidés par un premier ministre, lui-même désigné par l’assemblée de l’état ou de la région dont il est ressortissant.
• Le pouvoir législatif :
La République de l’Union de Birmanie a adopté un système législatif bicaméral. Le Parlement national (Pyidaungsu Hluttaw) compte donc deux chambres : la Chambre basse (Pyithu Hluttaw) équivalent à notre Assemblée nationale, et une Chambre haute (Amyotha Hluttaw) correspondant à notre Sénat. Le mandat des parlementaires est de cinq ans. La Constitution attribue 25% des sièges de chaque chambre aux militaires, les 75% restant étant soumis au vote des Birmans par suffrage universel direct.
Pour un amendement de la Constitution, plus de 75% des votes sont requis, ce qui donne de facto un droit de véto aux militaires, qui jouissent d’un pouvoir considérable dans le législatif. La Chambre basse compte 440 sièges (330 étant soumis au vote) et la Chambre haute en compte 224 (168 soumis au vote).
Chaque état et région possède sa propre assemblée, dont le nombre de représentants varie selon la densité du territoire. En dehors des 25% des sièges réservés aux militaires, le mandat de ces parlementaires s’élève également à 5 ans ; ils sont élus au suffrage universel direct. Ces 14 assemblées représentent au total 883 représentants.
• Le pouvoir judiciaire :
La plus haute institution judiciaire du pays est la Cour Suprême.
Au niveau local, 14 Hautes Cours de région et d’état ont été créées, et des tribunaux de cantons leur sont subordonnés.
La Constitution de 2008 a institué un tribunal constitutionnel constitué de 9 juges. Ce tribunal est chargé de vérifier la conformité des lois par rapport au texte constitutionnel et de trancher les potentiels débats sur la Constitution.

2 – Système juridique

Le droit birman est une combinaison unique de Constitution, de droit familial coutumier appelé Dammathat, de droit du common law anglais (mis en place lors de l’empire des Indes britanniques) et de récentes législations birmanes.
Le Dammathat est un ensemble de lois qui renvoient aux traditions coutumières et de ratio decidendi (justifications de décisions de justice rendue sous le droit du common law) apporté au fil du temps. Ces lois, appelées Dammathets, sont constituées de règles juridiques et de principes sur les affaires civiles ; elles concernent principalement le mariage, le divorce, la partition des biens, la succession, le patrimoine et l’adoption.
Les principales lois restantes du common law sont the Companies Act (traduction libre : loi sur les sociétés), the Contract Act (loi sur les contrats), the Evidence Act (loi sur la preuve), the General Clauses Act (loi sur les clauses générales), the Sale of Goods Act (la loi sur la vente de biens), and the Civil and Criminal Procedure Codes (le code de procédure civil et pénale). Ces lois sont placées sous le principe d’égalité des droits et d’égalité devant la loi.

3 – Organisation judiciaire

La Cour Suprême est la plus haute instance juridique de la Birmanie. Elle peut statuer dans certains cas en première instance, sinon en révision et en appel, et constitue le dernier recours sur le territoire birman (section 295 (b) and (c), the 2008 Constitution; sections 18 and 22, the Union Judiciary Law 2010).
C’est la seule Cour à pouvoir traiter des affaires maritimes, des affaires issues d’un traité bilatéral conclu par le pays, des contentieux entre l’Union et un état ou une région, entre états, entre régions, entre un état et une région, de la piraterie, des infractions envers les territoires de la République de l’Union de Birmanie, ses espaces maritimes et aériens, et des affaires non prévues par la loi birmane (section 295 a) de la Constitution de 2008; section 11, loi sur le pouvoir judiciaire de 2010).
Elle a le pouvoir de confirmer ou d’infirmer une peine capitale (section 14, loi sur le pouvoir judiciaire de 2010). Elle est compétente dans le transfert d’une affaire d’un tribunal à un autre, et peut s’attribuer une affaire d’un autre tribunal (section 15, loi sur le pouvoir judiciaire de 2010).
Les Hautes Cours de région et d’état ont été instituées par la loi sur le pouvoir judicaire de 2010. Ce sont des cours d’appel des décisions des tribunaux de district. Chaque état et chaque région en a une (section 305 de la Constitution de 2008). Elles sont compétentes tant pour les affaires pénales que civiles.
Les tribunaux de district, de division auto-administrée et de zone auto-administrée ont été institués par la loi sur le pouvoir judiciaire de 2010. Ce sont les tribunaux de premier appel. Ces tribunaux traitent d’affaires civiles et pénales ne dépassant pas les 500 millions de Kyats en première instance.
Les tribunaux cantonaux ont eux aussi été mis en place par la loi sur le pouvoir judiciaire de 2010. Ce sont principalement des tribunaux de première instance. Ces tribunaux peuvent statuer sur des affaires civiles n’excédant pas 10 millions de Kyats, et peuvent condamner l’accusé à sept ans de prison maximum.

4 – Justice des mineurs

Le conseil pour le rétablissement de la loi et de l’ordre a promulgué la loi sur l’enfance en 1993 afin de mettre en place les mesures conformes à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant. Est considéré comme enfant tout individu de moins de 16 ans, et comme jeune une personne entre 16 et 18 ans. Cette loi indique en théorie un traitement des délinquants juvéniles favorable à leur réinsertion future en société. De ce fait, les enfants ne peuvent être condamnés à mort, ni à perpétuité, et ne peuvent recevoir de coups de fouet. En revanche, les jeunes sont susceptibles de recevoir ces peines.
Dans la pratique, la responsabilité pénale étant fixée à 7 ans, de nombreux délinquants juvéniles sont exposés très tôt aux mêmes conditions carcérales que les adultes. Dans son rapport de 2012, le Comité des droits de l’enfant pose un constat alarmant : un nombre élevé d’enfants en détention provisoire, un recours important aux maltraitances corporelles, l’insuffisance du nombre de tribunaux pour mineurs, leurs conditions d’incarcération très difficiles, le manque de mesures adoptées pour aider à la réinsertion des jeunes à leur sortie,
Les tribunaux de canton sont disposés à traiter le cas de délinquants juvéniles, les tribunaux pour mineurs étant peu nombreux.
La Birmanie, sous l’incitation pressante de l’international, a ratifié la Convention sur les pires formes de travail des enfants de l’OIT, obligeant les dirigeants à ne plus employer d’enfants pour les travaux néfastes et dangereux. Début 2014, un Programme quadriennal pour l’élimination du travail des enfants a été lancé afin de lutter contre cette problème.

5 – Application des peines et système pénitencier

En 2011, la Birmanie comptait 43 prisons et une centaine de camps de travail. Les conditions de détention y sont particulièrement rudes : les détenus souffrent constamment de maltraitance physique et psychologique de la part du personnel pénitentiaire, qui ont très souvent recours à la torture. Les soins médicaux sont restreints et les conditions climatiques de certaines prisons sont extrêmes.
La prison d’Insein est la plus connue car elle est le centre de détention choisi pour les opposants politiques les plus médiatisés (notamment Aung Sang Suu Kyi, aujourd’hui principale figure de l’opposition et figure politique internationale).

En 2013, la population carcérale s’élevait à 60 000 personnes pour une population de 53,26 millions, ce qui correspond à un emprisonnement de 113 personnes pour 100 000 habitants. Le pourcentage de mineurs au sein des prisons est de 1,6%. Les prisons (hors camps de travaille) accueillent plus de détenus qu’elles ne sont en mesure d’en recevoir, le taux d’occupation s’élevant à 144,3% en 2002.

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